Si l'on savait compter à l'origine des calendriers, on ignorait tout du zéro qui, tel que nous le connaissons, apparaitra quelques siècles plus tard. Entre temps l'année d'origine était devenue un enjeu imperméable aux évolutions du calcul.

Astrolabe persan du XVIIIe Siècle (source wikimedia

Un problème qui semble arithmétique

Un problème niveau collége avec zéro et nombres négatifs :

Calculer la durée entre le 25 Décembre de l'An -1 (l'an 1 avant Jésus Christ) et le 1er Janvier de l'An 1 (après donc); à l'aide du calendrier actuellement en usage par ici (le grégorien c'est son p'tit nom) et de vos connaissances en arithmétique.

Prenez votre temps...

Deux possibilités, soit vous tombez dans le piège et obtenez une durée supérieure à l'année plutôt qu'une petite semaine, soit vous savez, et pouvez sans doute faire l'économie du reste de cette lecture!


Pour ceux qui comme moi on était surpris du résultat qu'ils ont obtenu:

Le problème ne se rencontre pas tant que l'on n'effectue pas un calcul de durée entre deux dates de part et d'autre de l'origine de ce calendrier (et de bien d'autres).

De plus, si la précision à l'année près n'est pas vérifié, sur de longues durées on peut même ne pas s'en rendre compte!

Un coupable? Le calendrier grégorien et son absence d'année zéro?

Un problème d'astronomie ancestral

Le calendrier grégorien est aujourd'hui utilisé dans la majeure partie du monde. C'est à ce calendrier auquel nous faisons constamment référence.

Cette hégémonie parmis les différents calendriers et systèmes possibles ne s'est pas fait sans péripéties, comme le passage du calendrier julien au grégorien.

Il reste qu'entre l'introduction du zéro en Europe et la réforme pour ce calendrier, ce déroule au bas mot trois siècles. Les savants du XVIᵉ siècle connaissait le zéro.


Des tablettes en pierre gravées, des poteries, des fresques témoignent de la précision et de l'importance que nos ancêtres prêtaient aux mouvements des planètes et étoiles il y a des milliers d'années.

Les astres ne concernent pas que les astronomes, mais ils sont durant plus d'un millénaire et quelques siècles les premiers concernés par l'ensemble des calculs liés au temps. Ces calculs et observations pour la mise au point de calendrier précis contribueront au développement d'une démarche savante vers une démarche scientifique.

Durant des siècles, la mise au point de calendriers adaptés à la situation géographique et aux pratiques du dit royaume était confiée à des astronomes de renom. Ces travaux sur les astres et la mesure du temps à travers eux aboutiront au XXᵉ siècle à une mesure du temps universel pouvant s'appliquer en tout point de - ce que nous appellons aujourd'hui l'l'univers observable.

Bref, l'absence de zéro ne peut pas être un simple oubli, en fait c'est le signe d'une divergence entre un calendrier pratique pour s'organiser et un calendrier comme outils de précision d'astronomes.


Un problème politique pratique

Le besoin de mettre au point une mesure du temps sur les cycles de rotation de la Terre autour du Soleil, et de la retranscrire de manière intelligible a abouti aux tables astronomiques, sources des calendriers.

Avec l'adoption logique de l'année 0 par les astronomes pour faciliter les calculs de mesure du temps, on a là un exemple d'une pratique savante qui n'aura aucune influence sur notre pratique générale malgré les siècles qui séparent ces différentes étapes, et encore aujourd'hui.


Jacques Cassini (1677-1756), second d'une lignée renommée d'astronomes, introduit en 1740 une année 0 dans ses tables d'astronomie qui feront alors référence... que pour les astronomes.

Dès lors, selon ces tables, un certain jésus serait circonci le 1er Janvier de l'An 1, comme avant, mais après le Noël du 25 Décembre de l'An Zéro et non pas de l'An -1 (avant JC) comme le suggère la chronologie standard du calendrier grégorien.


On notera le choix de mettre cette année zéro l'année de cette naissance symbolique, et donc de ne pas adopter le même point d'origine que le calendrier de référence.


C'est que l'affaire aurait entrainé, avec cette histoire débutant alors entre -1 et 0, que chaque année recensée depuis lors soit augmentée d'une unité, d'une année. L'esprit pratique est heurté de plein fouet!


Une histoire ancienne

En France, en 1793, quelques dizaines d'années après la correction en toute rigueur de cet astronome, un nouveau calendrier républicain veut s'imposer, n'y parviendra que briévement et partiellement, et surtout n'aura toujours pas d'année Zéro.

Même pour l'être suprême de l'époque dite moderne il apparait toujours difficile d'associer une année au chiffre zéro, même si sa place serait bien d'être l'année d'origine (du calendrier ou de n'importe quelle échelle pour mesurer une durée).


C'est qu'entre temps, même si manifestement tout cela a toujours une importance symbolique de premier plan, les distances deviennent considérables et personne n'est plus vraiment à une année près lorsque l'on parle d'événements se déroulant il y a plus de deux mille ans.

Voilà qui - pour un esprit pratique - rencontre une certaine réalité historique, ces époques deviennent si reculées qu'on se soucie peu que toutes les dates historiques antérieures au point d'origine soient impropres à servir au calcul d'une durée avec une date historique située au-delà de l'origine.


Maintenant je sais, lorsqu'on calcule avec des dates, ce n'est pas le choix d'une bonne arithmétique qu'il faut faire mais celui d'un bon comput!